Par suite des dispositions propres aux assurances décès, le législateur a dû arrêter une modalité explicite d’assujettissement à l’ISF de contrats d’assurance vie :
« Les primes versées après l’âge de 70 ans au titre des contrats d’assurance non rachetables souscrits à compter du 20 novembre 1991 et la valeur de rachat des contrats d’assurance rachetables sont ajoutées au patrimoine du souscripteur. (art. 885 D CGI).
Deux lectures de cette disposition sont envisageables. Elles viseraient:
- soit, tout contrat d’assurance par nature rachetable au sens du Code des assurances;
- soit, tout contrat d’assurance qui peut être racheté librement par le souscripteur ou l’adhérent.
En pratique, les conséquences de l’acceptation du contrat par le bénéficiaire font l’objet d’une jurisprudence civile et d’une doctrine partagées.
Naturellement, si civilement il découlait d’une acceptation de la clause bénéficiaire l’impossibilité pour le souscripteur de procéder au rachat du contrat à son profit, son assujettissement à l‘ISF s’avérerait délicat. Une telle évolution pourrait naturellement — au regard des montants partiellement en jeu (38 O/o de l’épargne financière des ménages) — appeler une réaction législative (sauf à viser une marginalisation de l'ISF).
En toute hypothèse, l’Administration fiscale devrait communiquer sa doctrine à cet égard.
Au terme de ce rapide panorama, la fiscalité applicable à l’assurance vie ne semble appeler d’interrogations techniques que dans des hypothèses forts marginales n’intéressant, somme toute, qu’un (très) faible pourcentage des encours sous gestion.
Inversement, sur un plan politique, par suite des montants en jeu (plus de mille milliards d’euros), et de déficits abyssaux des budgets de l’Etat (en particulier des organismes sociaux), la probabilité est grande de voir, au moins pour l’avenir, le législateur subir la tentation de dégrader — relativement ou à titre absolu — la fiscalité applicable à l’assurance vie.
Sur un plan relatif, l’exonération des successions entre conjoints et la majoration d’abattement au bénéfice des descendants à 150000€ induit une diminution significative de l’appétence des consommateurs pour l’assurance vie (estimée à 10 0/0 de son chiffre d’affaires actuel, et clairement plus marquée en nombre de souscriptions).
Naturellement, il convient, à cet égard, d’observer que les évolutions relatives peuvent être appelées à jouer à l’envers à l’occasion d’une nouvelle législature... et que les charmes financiers et civils de l’assurance vie (au bénéfice du conjoint survivant et des descendants) perdurent.
Sur un plan absolu, l’éventuelle dégradation de la fiscalité de l’assurance vie pourrait prendre de multiples formes. À titre de simples exemples, il est loisible de penser à l’éventuelle tentation — pour le législateur (actuel ou futur) :
- de supprimer l’abattement de 152500 € par bénéficiaire en assurance en cas de décès (art. 990 CGI);
- de considérer que les rachats partiels portent d’abord sur les produits et non plus sur du capital et des produits (art. 125-0 A COI);
- d’assujettir annuellement aux prélèvements sociaux les contrats multisupports ;
- de porter de 8 à 12 ans la durée des contrats pour ouvrir droit à un prélèvement privilégié de 7,5% (à l’encontre d’une norme de 18% pour l’ensemble des produits financiers;
- de conditionner tout avantage spécifique à une quote-part « Actions > significative dans l’épargne détenue...
Au terme actuel de son évolution, il importe en effet, d’observer que les spécificités de la fiscalité de l’assurance vie bénéficient à une minorité de souscripteurs.
Cette concentration de ses effets favorables peut alors être appréhendée comme un facteur de fragilité quant à sa pérennité dans l’hypothèse d’un changement de majorité politique.
Inversement, en l’absence durable du trust dans la législation, l’assurance vie dans une approche patrimoniale peut être considérée comme un outil indispensable de préservation de la localisation en France des patrimoines les plus significatifs...