La protection réservataire en assurance-vie ne joue qu’au décès. Elle n’a pas grand sens au jour de la souscription, on ne sait que donnera le calcul de la réserve au décès.
Rappel : les quotités s’appliquent à une masse fictive reconstituée : ce qui reste dans le patrimoine plus les donations réactualisées au jour du décès.
Exemple : Une femme a deux enfants. Elle a souscrit en 1992 un contrat d’assurance sur lequel elle a versé une prime de 300 000€.
> Le bénéficiaire est sa nièce.
> Elle décède le 1er novembre 1997. Le capital décès est de 380 000 €.
> Les biens existant au jour de son décès sont de 300 000 €.
Les deux enfants demandent au tribunal la réduction de la prime versée sur le fondement de primes manifestement excessives.
> Calcul de la quotité disponible :
- biens au jour du décès : 300 000 €
- prime versée : 300 000 €
TOTAL = 600 000 €
Quotité disponible : 1/3 200 000 €
Réserve de chaque enfant : 200 000 €
Une indemnité de réduction de 100 000 € est due par la nièce à la succession, 50 000 € au profit de chaque enfant, afin que chacun dispose de 200 000 € (la moitié des biens au décès et la moitié de l’indemnité de réduction).
À savoir : Le patrimoine ne doit pas être apprécié au moment du décès, mais au moment du versement de la prime (l’état patrimonial doit être fait en à la période : 1992).
Dans TOUS LES CAS, les intérêts produits reste au bénéficiaire soit 80.000 Euros. Donc au minimum la bénéficiaire aura 280 000 Euros.
En pratique, le notaire pourra être mandaté par les héritiers réservataires agissant dans le cadre de l’article L I 32-l 3 C.cass afin de savoir si les primes sont manifestement excessives au regard de la réserve. La compagnie sera dans l’obligation de répondre, engageant sa responsabilité dans le cas contraire.
Il est possible de citer en ce sens une réponse ministérielle Houteer du 28/12/81 :
“Il semble que l’héritier doit pouvoir obtenir la communication du contrat d’assurance vie souscrit. L’héritier peut exiger que lui soient révélés les éléments du contrat qu’il est nécessaire de connaître pour déterminer s’il y a lieu de mettre en œuvre les dispositions d’ordre public de l’article L 132 13 du Code des assurances qui prévoient la réduction des primes d’assurance vie exagérées au regard des facultés de l’assuré décédé.
Dans ce cas, il semble même que l’intéressé pourrait obtenir le nom et l’adresse du bénéficiaire du contrat, au besoin par la voie judiciaire, si ces indications s’avéraient indispensables pour réaliser la réduction.”
Une décision du TGI d’Angoulême du 20/02/1997 a également décidé qu’en sa qualité d’héritier, le demandeur a qualité pour obtenir l’identité du bénéficiaire d’une assurance souscrite par son père, et qu’en sa qualité d’héritier réservataire, la compagnie ne saurait lui opposer le secret professionnel.
Une décision de la cour d’appel de Paris du 29/09/1998 a admis qu’une épouse bénéficiaire d’un contrat d’assurance vie, qui avait dissimulé l’existence de versements importants réalisés quelques jours avant le décès du souscripteur, s’était rendue coupable d’un recel successoral à l’égard des cohéritiers, en l’espèce les enfants du souscripteur nés d’un premier lit.
La cour a condamné la veuve à payer aux enfants une somme égale aux versements effectués et représentant le montant global des donations recelées, sur laquelle elle a été privée de toute part. La dissimulation et le silence quant aux primes versées peuvent donc conduire le bénéficiaire à perdre tout droit sur le capital assuré.